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Les
éditoriaux de PLS : "L'éclairage
de Pierre Luc Séguillon pour mieux discerner les enjeux et saisir la complexité
de l'actualité."
Lundi 4 novembre 2002 : La victoire électorale sans conteste des islamistes en Turquie ne fait qu'accuser le dilemme auquel est confrontée l'Union européenne depuis plusieurs décennies et que les Quinze sont supposés tranchera à la mi-décembre au prochain sommet de Copenhague. La question est en effet aussi simple qu'est complexe la possible réponse. Par de là les considérations économiques et géographiques le problème, force est d'en convenir lucidement, est d'abord culturel. Vaut-il mieux intégrer dans la vieille Europe de tradition majoritairement chrétienne une Turquie majoritairement musulmane au motif que serait de la sorte constitué un grand ensemble laïc et démocratique modèle de tolérance pour le reste du monde islamique? Serait-il plus raisonnable au contraire de laisser la Turquie hors les frontières de la communauté européenne, au risque de la pousser vers un tropisme islamiste et pantaturc que n'a pas totalement effacé la révolution kémaliste? Le large succès remporté par l'AKP, le soit disant parti islamique modéré de la Justice et du Développement plaide autant pour l'intégration de la Turquie dans l'Union européenne que pour son maintien à l'écart de cette communauté de destin. Le marasme économique du pays et l'incapacité des partis laïcs à le surmonter expliquent en grande partie le succès de la formation populiste de Recep Tayyip Erdogan. On ne peut oublier cependant que l'ancien maire d'Istamboul bien qu'il joue maintenant la modération, a été déclaré inéligible, qu'il a été condamné pour incitation à la haine religieuse, que son parti comporte une minorité d'extrémistes et qu'il se propose de tolérer le port du voile à l'école. Mais on ne peut nier aussi que l'AKP a fait profession de respecter la laïcité et que l'armée turque a toujours été et demeure un garant de la laïcité du pays et qu'elle a prouvé dans le passé sa capacité à la défendre lorsque celle-ci était menacée. Ouvrir aujourd'hui les portes de l'Europe à la Turquie c'est peut-être l'aider à surmonter la tentation du démon de l'islamisme intégriste. Ce peut-être aussi introduire le virus d'un intégrisme musulman dans la communauté. Dans un mois et demi, les Quinze devront choisir entre deux maux. A moins qu'une fois encore ils ne trouvent quelque prétexte à différer une décision qu'ils ont le plus grand mal à prendre. Celle de dire clairement « oui » ou « non » à l'intégration de la Turquie dans l'Union européenne. |