Les affiches rouges bordées de noir, les affiches qui annonçaient la mort des héros, celles qui faisaient serrer les poings vides dans les poches des patriotes, celles qui, plus tard, déclenchaient les percuteurs des revolvers F.T.P.F.! Vous en souvient-il Parisiens ?... Vous souvient-il de cette affiche qui, au début de cette année, couvrit les voûtes du métro ? Elle portait une dizaine de têtes, toutes fières et courageuses.
Non, il est vrai, ce n'étaient pas là des têtes de Français. Mais tous, citoyens de pays opprimés et martyrisés par l'envahisseur hitlérien, combattaient à nos côtés pour la France et pour leur patrie, pour notre pays et pour nos alliés.
Au centre de l'affiche, un nom maintenant prestigieux Manouchian, un Arménien. J'ai vu l'épouse et la collaboratrice de Manouchian. A l'Humanité, ses camarades sont venus en délégation.
Voici le capitaine Pétrossian, le vengeur de Manouchian. C'est un soldat de l'Armée Rouge, un citoyen de la Libre République Soviétique d'Arménie, un admirateur de notre pays.
Prisonnier des Boches, incorporé de force dans la Wehrmacht en France, il n'a eu qu'un but, participer à la lutte avec les Francs-Tireurs Français.
« Nous avions fixé le 5 juillet 1944, à 1 heure du matin l'heure de la révolte de toute la légion arménienne en garnison à Mende. Mais la Gestapo fut alertée et c'est en hâte, à 10 heures du soir, que nous dûmes au nombre, de 56 franchir les barrages allemands pour rejoindre les F.T. P.
Le capitaine Pétrossian a rencontré les F. T. P. F.
— Comment avez-vous su qu'il y avait des F. T. P. en France ?
— D'abord, en marchant, vêtu de l'uniforme exécré de la Wehrmacht, j'ai vu dans le métro la photographie de Manouchian.
« Cet homme, martyr des Allemands, avait donc pu combattre en France Il était Arménien comme moi ! Mon devoir était donc de prendre sa place dans le combat pour la libération de la France. Sur ce quai de la station Opéra, j'ai pris la décision de venger mon compatriote, de venger aussi tous les Français martyrs, et mes camarades soviétiques en tuant 100 Boches de ma main, j'ai tenu ma promesse.
— Pour trouver un contact avec les patriotes français, il vous a sans doute fallu beaucoup de patience, beaucoup de prudence et cela a sans doute exigé un très long temps ?
— Oui, hélas ! A Mende nous avions enfin réussi. Un menuisier de la ville était là, qui réparait, une boiserie. Nous devions l'aider. Nous avons parlé. Oh très difficilement, nous nous exprimions très mal en français. Mais nos yeux parlaient pour nous. Nous nous sommes compris c'était un F. T. P. Et depuis nous avons appris à aimer toujours plus, les Français : ce sont des vaillants ».
Roland DIQUELOU.
(A suivre)