- " Arméniens quoi qu'il en coûte!" Jean-Pierre Richardot - ed. Fayard
Témoignage de Achod Malakian Henri Verneuil) :
"Je suis né le 15 octobre 1920 dans un village proche de Constantinople. Il nous a fallu partir, car les massacres, commencés en 1915, se poursuivaient au moment de ma naissance et ont duré jusqu'en 1923. L'une de mes tantes est devenue folle de douleur quand les Turcs ont noyé ses enfants devant elle, en les plaçant dans des paniers, qu'ils faisaient couler au milieu de la rivière. C'était général. Partout nous étions en butte aux massacres. Le sang coulait dans les ruisseaux. A ce moment-là mon père a décidé de fuir. Nous nous sommes évadés en Grèce où je suis arrivé à l'âge de 2 ans. Mon père était armateur et il a dû laisser tout ce qu'il possédait derrière lui. Après avoir passé deux ans en Grèce, mes parents ont décidé de se rendre au Mexique. En cours de traversée, ma mère a eu un mal de mer très très fort. Peu après le départ, elle avait vu qu'on jetait une morte à la mer. Alors elle a dit à mon père: " je sens que je vais mourir, je ne veux pas être enterrée comme cela, arrêtons-nous à la première escale" La première escale était Marseille et nous y sommes restés 26 ans de 1924 à 1950. Au deuxième jour de notre arrivée, mon père est donc allé chercher du travail à la raffinerie de sucre de Saint-Louis, à Marseille, et on lui a donné un job de nuit, c'est-à-dire qu'il prenait son travail à 9 heures du soir, par 45-50°, et dans les sous-sols il fermait et ouvrait les robinets de sucre chaud, lui, le bourgeois de Constantinople."
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