| « Pélérinage vers Bahrat. 
        Le réveil des Indo-Arméniens »par Hamo MOSKOFIAN
 
 
 
        Dès que l’avion survole cette vaste étendue 
          continentale appelée Inde, on essaie de comprendre comment, alors que 
          n’existaient pas les moyens de communications modernes, des milliers 
          d’Arméniens persécutés ou déportés sont arrivés sur cette terre de Bahrat 
          – le nom hindi qui désigne l’Inde – afin d’y fonder des communautés 
          florissantes.
 
Les nombreuses églises, écoles, monuments historiques, 
          cimetières, bâtis par les Indo-Arméniens sont de nos jours préservés 
          et protégés grâce à la petite communauté forte de 200 individus et avec 
          l’assistance des étudiants du lycée philanthropique arménien de Calcutta. 
          Par ailleurs, l’ouverture d’une ambassade d’Arménie dans la capitale 
          indienne, représentée par Son Excellence Armen Païpourtian, et celle 
          de l’Etat indien à Erévan, représentée par Son Excellence Bal Anand, 
          marquent le début d’un processus de renaissance de la communauté indo-arménienne. 
           
         
          |  
              Hamo Moskfian 
              et l'ambassadeur de l'Arménie  
              à New Dehli |  
              Mgr Balozian en Inde
             |  
        C’est au IXe siècle que le commerçant Tomas, 
          homme très pieux, introduit le christianisme en Inde où il crée l’Eglise 
          Apostolique de Malabar, cependant qu’en début du XVIe siècle, durant 
          l’âge d’or de la dynastie des Moghols, on voit des Arméniens s’illustrer 
          non seulement dans le commerce mais aussi dans les domaines de la politique 
          et de la culture. Plus encore, l’une des trois reines du roi Djelaleddin-Al-Akbar, 
          Mariam Zamana, était arménienne et le petit palais qu’elle possédait 
          à Fathpur Sikri dans la ville fortifiée d’Agra est aujourd’hui bien 
          conservée et entretenue. La sœur de Mariam, Giuliana, épousa même un 
          duc français par l’entremise d’Abkar, un grand mécène. Quant aux héritiers, 
          ils occupèrent des postes de gouverneur ou de diplomate. On trouve même 
          un poète Mirza Dju-Al-Kurein (Alexandre), fils d’un négociant de Djura, 
          qui exerçait son talent auprès des princes et princesses dans les Cours 
          royales de Djahangir et Djihanchah. 
 
Abd-Al l’Arménien s’est distingué dans la Justice, 
          Hagop Bédros et Korkin Khan (de son vrai nom Haroutioun) ont apporté 
          une active contribution en politique tandis qu’au plan militaire, on 
          cite le nom du célèbre armurier de Lahore, Agha Nazar, père du fameux 
          canon «Zamzama». 
 
Dans l’histoire de la poésie indienne, on relève 
          le nom de l’Arménien Chehid Sarmat dont le tombeau se trouve dans la 
          plus grande mosquée de Delhi devenue de nos jours le lieu de pèlerinage 
          de millions de musulmans et d’hindous. 
 
En 1794, de respectables citoyens de Madras, 
          tels les frères Chahamirian, Haroutioun Chemavonian, Hovsep Emin, Mesrob 
          Taghiatian ont donné naissance au premier journal arménien Aztarar et 
          édité d’excellents ouvrages politiques, des livres d’inspiration nationaliste, 
          notamment Vorokaït Parats, mais encore la première Constitution de l’Inde 
          et de l’Arménie. C’est d’ailleurs ce même Hovsep Emin chef du mouvement 
          de libération nationale arménien qui, avec l’aide du Groupe de Madras, 
          trouvera refuge en Occident puis en Russie et en Géorgie. Ce courageux 
          personnage repose pour l’éternité dans la nécropole de l’église Saint-Nazareth 
          à Calcutta, entouré des tombes d’Arméniens de grande renommée comme 
          Agha Khatchig d’Arakel, Agha Bedros Arroutoun, Hovannès Galestian ou 
          encore Haroutioun Abkar. 
         
          |  
              Jeunes Arméniens  
              du Collège philanthropique  
              de Calcutta |  
              Le cimetierre arménien d'Agra |  
        La première tombe porte la date 1630 alors que 
          l’église Saint-Nazareth a été construite en 1734 par Agha Nazar, bénie 
          et restaurée en 1963 par Sa sainteté Vazken 1er, Catholicos de Tous 
          les Arméniens, lors de sa visite historique en Inde. C’est d’ailleurs 
          cette même année là que fut posée la première pierre pour la reconstruction 
          du lycée Martasirats (philanthropique), jadis grand centre de science 
          et de savoir, grâce à la générosité de riches donateurs. Dernière grande 
          figure de l’économie et de la politique, Khatchig Paul Tcharteri, décédé 
          à Hong Kong au début du siècle dernier, qui avait fait don d’un hospice 
          pour vieillards. 
 
S’il reste des traces importantes des communautés 
          arméniennes d’Agra, Bombay, Surat ou Tchensoura, édifices, cimetières, 
          etc. c’est à Calcutta que la collectivité nationale reprend vie. Une 
          réussite due pour l’essentiel aux efforts du jeune directeur du lycée 
          et également ministre du culte des Indo-Arméniens de Calcutta, le révérend 
          père Ghevont Ghevontian, et de Sonia John responsable communautaire. 
          C’est dans ce lycée qui accueille des jeunes gens venus d’Arménie et 
          de la diaspora, que va se forger désormais le nouveau destin des Arméniens 
          de cette région du monde. 
 
Article paru dans . le bi-mensuel franco-arménien Achkhar (Paris) [N° 1962, Nlle Série 
          : N° 310, du Samedi 20 Avril 2002, page 6]
 . Nouvellles d'Arménie Magazine
 |