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Intervention du 18 mars 2010 à la 13e session du Conseil des droits de l’homme
– ONUG –
par Aline Dédeyan –
Table ronde interactive sur la prévention et répression du génocide et autres crime contre l’humanité
– enjeux et défis dans l’application de la convention de 1948
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  • «Ne pouvant explorer le dossier arménien moi-même lors de ce forum, je suis très touchée par les déclarations des Professeurs De Zayas et Eya Nchama citant, entre autres, le génocide des Arméniens comme premier génocide du XX siècle.

    On continue à parler du génocide défini comme crime contre l’humanité – une des pires formes d’exploitation d’individus, de groupes ou de population, souvent minoritaires, de culture (langue, mentalité, croyances, comportements) différents – considérés comme entités indésirables par le (les) pouvoirs dominants. Ni compris, ni acceptés, ni même tolérés, ils seraient donc «des éliminables ».

    Aujourd’hui plus que jamais on examine les motivations et les responsabilités des auteurs de génocide ainsi que le destin des victimes en formulant des sanctions, en prenant des mesures de réconciliation et de pardon et en légiférant sur les mécanismes de réparation.

    Malgré l’avancé des ces instruments de sensibilisation, d’alerte précoce, de prévention, d’assistance, de jugement et de répression lancés par l’ONU aussi bien que la communauté internationale, les ONG et autres institutions nationales et régionales, le génocide ne cesse de noircir l’histoire des civilisations. Il manque un récapitulatif historique, une sorte d’anthologie compréhensive citant tous les génocides des deux derniers siècles. Avec, en parallèle, les ravages du négationnisme qui, dans certains cas, empêche l’accès à la vérité malgré cette fameuse résolution du Haut Commissariat aux droits de l’homme sur le droit à la vérité. Je cite « les meilleures pratiques nationales et internationales, en particulier d’ordre législatif et administratif … » dont l’examen é été repris à cette session du Conseil des droits de l’homme.

    Un bref récapitulatif des concepts, mécanismes, conventions, pactes, déclarations, résolution et décisions internationaux sur le génocide débuterait par l’adoption en 1948 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Suivie de celle sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, la Cour internationale de Justice, le statut de Rome en vigueur depuis 2002 avec la création de la Cour pénale internationale, ainsi que la mise en place des tribunaux ad hoc pour chaque cas spécifique de génocide. Les textes in extenso de ces instruments sont dans les Recueil d’instruments internationaux de l’ONU et leurs suivis dans les documents pertinents de l’ONU, y compris de l’AG et du Conseil de sécurité.

    Malgré les références fréquentes à la Convention sur le génocide, son dernier rapport mis à jour par le rapporteur spécial, Benjamin Whitaker, présenté à la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et la protection des minorités, date de 1985. Suite à ce rapport et à son précédent de Ruhashyankiko , deux autres membres de ladite Sous-commission ont lancé deux principes majeurs relevant du droit international  servant de base pour l’examen des cas de génocide : le principe du précédent (le rapport Guissé) et celui de l’impunité (le rapport Joinet).

    Depuis, les structures internationales ainsi que les procédés ayant trait aux droits de l’homme ayant largement évolués, la dite Sous-commission s’est mutée en Sous-commission de la promotion et de la protection des droits de l’homme – organe de la Commission des droits de l’homme – elle-même convertie, en 2006, en Conseil des droits de l’homme focalisé, principalement, sur l’examen périodique universels (UPR), exigeant des Etats membres des rapports périodiques faisant état de leur législation en en matière des droits de l’homme en vertu des traités/pactes/conventions auxquelles ils auraient adhéré.

    Avant sa conversion en Conseil, un rapport de la Commission des droits de l’homme entreprenait une étude de la protection et la promotion des droits de l’homme par la lutte contre l’impunité  en énonçant 38 Principes de droit international et de droit humanitaire international découlant des rapports de ladite Sous-commission et, notamment, du principe Joinet.

    En juillet 2004, Kofi Annan, mandaté par le Conseil de sécurité, nomme Juan Mendez, Conseiller spécial du Secrétaire général chargé de la prévention des génocides. S’ensuit l’adoption d’un Plan d’action en cinq points. En résumé : (a) la prévention des conflits armés internes propices aux actes de génocide ; (b) la protection des civils dans les conflits armés , y compris par les soldats de la paix de l’ONU dotés de mandat pour la protection des civils ; (c) la levée de l’impunité … mesures judiciaires tant nationales qu’internationales ; (d) alerte rapide  et claire en cas de situation susceptibles de dégénérer en génocide … (e) et la mise en place à l’ONU même des capacités pour l’analyse et le traitement des informations avec prise de décision rapide et efficace pour l’adoption d’une série de mesures, y compris d’ordre militaire…

    En 2007, Francis Deng, le nouveau Conseiller spécial du SG, y ajoute la définition d’un cadre d’analyse pour déterminer le risque de génocide : l’existence d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux condition préalable au génocide ; l’existence de discrimination et d’autres violations à l’encontre de ces groupes ; la prise en compte des facteurs ayant une incidence négative sur les capacités internes de prévention du génocide – législation, coutumes, etc. ; l’existence des protagonistes armés issue d’un groupe de population particulièrement vulnérable ; motifs politiques ou économiques des dirigeants d’un pays encourageant les divisions internes entre différents groupes ; des précédents de violations des droits de l’homme susceptibles d’être constitutives d’acte de génocide ; période de vulnérabilité prévisible telles que période d’élections et d’activités connexes ; l’existence de raisons de croire en une intention de détruire, en tout et en partie… - reprenant les thèses de Whitaker.

    La responsabilité des Etats de protéger les groupes vulnérables avancée par le droit international fait désormais partie de la prévention du génocide. Les paras. 138 et 139 : Devoir de protéger des populations contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité (Document final du Sommet mondial de 2005 - A/60/L.1). … exige la mise en ouvre des moyens diplomatiques, humanitaires et autres de nature pacifiques… je cite, «  une action collective résolu par l’entremise du Conseil de sécurité », conformément aux chapitres pertinents de la Charte pour la protection des populations ou des groupes visés.

    Entre 1998 et 2005 viennent s’y ajouter six résolutions sur la Convention du génocide émanant de la délégation arménienne, toutes adoptées à l’unanimité par la Commission des droits de l’homme après consultation avec les parties intéressées.

    La résolution 1998/10 sur le 50e anniversaire de la Convention sur le génocide demandant aux Etats d’accroître et d’intensifier leurs activités à appliquer intégralement les dispositions de la Convention. La résolution 1999/67 proposant l’examen de l’état des Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme. La résolution 2001/66 invitant, entre autres, les Etats qui ne l’ont pas encore fait à ratifier la Convention ou à y adhérer… en adoptant la législation nécessaire conformément aux dispositifs de la Convention. La résolution 2003/66 invitant, entre autres, le Secrétariat et les organes et organismes des NU de diffuser largement le texte de la Convention pour assurer son universalité et son application intégrale. La résolution 2005/62 priant, entre autres, de mettre à la disposition de la Commission un rapport sur la mise en œuvre du Plan d’action et des activités du Conseiller spécial. Et celle 7/25 de 2008 réitérant le mandat du Conseiller spécial et demandant un rapport actualisé sur l’action du système des NU pour prévenir le génocide…

    Malgré l’élaboration des instruments de prévention et de répression du génocide par les instances onusiennes, aucun Protocole additionnel n’est venu renflouer la Convention. Ni même un rapporteur spécial n’a été nommé pour mettre à jour son dernier rapport. Comme tant d’autres conventions et pactes ayant trait aux droits de l’homme, elle n’a jamais été dotée d’un treaty body – organe de surveillance des traités – obligeant chaque Etat signataire de soumettre un rapport périodique sur sa législation relative à la convention, soumis à l’analyse, aux critiques et aux recommandations des experts  internationaux. Les raisons de ces décisions ne sont pas connues.

    Reste à savoir le rôle et le fonctionnement futur du Budapest Centre on the International Prevention of Genocide and Atrocities dont la création fut adoptée à la douzième session du Conseil en 2009.

    Aline Dedeyan – juillet 2010
    adedeyan@yahoo.com

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