SOIRÉE DE L’AMITIÉ

GUADELOUPE –ARMÉNIE

armenindiens.lescigales.org/


23 novembre 2007

au Ciné-Théâtre du Lamentin
avec projection du film "Mayrig"

en présence de Sophie Malakian,
fille d'Henri Verneuil



Serge Dozikian


Sophie Malakian



  • Projet de jumelages de villes, de lycées et de mémorials des départements d'Outre-Mer avec l'Arménie (prévu)

  • Versions des films d'Henri Verneuil Mayrig et 588 rue du Paradis en créole ! (prévu)
  • Pour donner une suite à la journée de rencontre Guadeloupe-Arménie qui s’est déroulée à Trois-Rivières le 28 mai, jour de l’indépendance de l’Arménie, une soirée culturelle a regroupé des Arméniens de Guadeloupe et de nombreux participants. L’ « Année de l’Arménie », bien au-delà des dates officielles (septembre 2006-septembre 2007) a commencé pour nous il y a bien longtemps, lorsque nos parents sont arrivés sur la terre d’accueil, et se prolongera toujours dans nos pensées. Les « Arménindiens », entendez par là les citoyens d’origine arménienne de la Guadeloupe, ont tenu à marquer d’une nouvelle journée particulière l’ « Amitié Guadeloupe-Arménie ».

  • Le 23 novembre, au Ciné-Théâtre du Lamentin en Guadeloupe, la projection de « MAYRIG » un film d’Henry VERNEUIL (Achot MALAKIAN dans le civil) , a réuni plus d’une centaine d’amis et de sympathisants de cette idée de réunir les cultures antillaise et arménienne.

  • Le film « MAYRIG » retrace une tranche de vie sous tous ses aspects, d’une famille d’Arméniens débarquée à Marseille, fuyant le génocide perpétré par l’Etat Turc, et leur problématique adaptation à la culture française. Le narrateur est Azad l’enfant de la famille qui est, on le comprend à la charge émotionnelle portée par le scénario, celui qui a réalisé bien plus tard ce film très proche de l’autobiographie. On y évoque les thèmes du courage, de l’abnégation, du travail, de la tolérance, de la famille, qui font partie des valeurs de la culture arménienne.

  • La projection a été précédée d’un accueil explicatif de la soirée par les animateurs de circonstance Guiragos Eric RUSDIKIAN l’initiateur du programme , Serge DOZIKIAN , Vartkès Robert HAMPARIAN, puis de la présentation du film par Sophie MALAKIAN, fille du réalisateur et qui nous a gratifié de son aimable présence.

  • Sophie a su avec talent et émotion nous communiquer l’admiration et l’affection qu’elle a gardées pour son père, devenu par son art un des grands cinéastes français du vingtième siècle. La projection de MAYRIG a ensuite suffi à gagner tous les cœurs.

  • Une discussion débat a permis après la projection de présenter la Communauté Arménienne et ses traits historiques et culturels. Le débat s’est axé principalement sur le thème : « Émigration et intégration : l’exemple des Arméniens ». Sophie, Eric, Serge et Vartkès ont évoqué chacun leur propre parcours et répondu de leur mieux aux questions posées par une assistance attentive et sensible.

  • Tout le monde a ensuite été invité sur l’aire d’accueil-restauration et a pu apprécier les savoir-faire conjoints des gastronomies arménienne et créole.

  • Une belle manifestation culturelle qui nous a tous séduits.

  • Vartkès Robert HAMPARIAN


Vartkes Hamparian


Eric Rusdikian

= DISCOURS DE SOPHIE MALAKIAN, FILLE D'HENRI VERNEUIL =

  • IL Y A QUELQUES SEMAINES, J’AI REÇU UN APPEL TÉLÉPHONIQUE D’ÉRIC RUSDIKIAN, JE NE LE CONNAISSAIS PAS ET POURTANT SON NOM SONNAIT COMME UN NOM FAMILIER.

    CAR IL SE TERMINE COMME LE NOM QUE MON PÈRE M’A DONNÉ À MA NAISSANCE, ET JE SUPPOSE COMME LE NOM D’UN CERTAIN NOMBRE D’ENTRE VOUS CE SOIR,

    SI JE SUIS ICI CE SOIR, C’EST PARCEQU’UNE FOIS N’EST PAS COUTUME, JE SUIS FIÈRE DE VENIR PARLER DE CET HOMME HORS DU COMMUN QU’ÉTAIT MON PÈRE, ACHOD MALAKIAN DIT HENRI VERNEUIL, ET DE L’HÉRITAGE CULTUREL QU’IL NOUS A LAISSÉ.

    « MAYRIG » N’EST PAS SEULEMENT LE PLUS PERSONNEL DE SES FILMS, C’EST AUSSI SA CONTRIBUTION À FAIRE CONNAÎTRE LES ARMÉNIENS , LEUR HISTOIRE, ET LEURS VALEURS.

    APRÈS AVOIR TOUT FAIT POUR S’INTÉGRER DANS CE PAYS D’ACCUEIL

    QUI LUI A PERMIS DE DEVENIR L’UN DES PLUS GRANDS METTEURS EN SCÈNE FRANÇAIS, IL SIGNE CE FILM, VÉRITABLE RETOUR SUR SES RACINES ET SUR SON ARMÉNITÉ.

    « MAYRIG » N’EST PAS SEULEMENT UN HOMMAGE À SA MAYRIG (QUI VEUT DIRE MAMAN EN ARMÉNIEN, COMME VOUS LE SAVEZ), MAIS AUSSI UN HOMMAGE AU PEUPLE ARMÉNIEN EXILÉ, ET À SON DÉSIR D’INTÉGRATION QUI LUI A PARFOIS UN PEU FAIT PERDRE LA FIERTÉ DE SES ORIGINES .

    « MAYRIG » ET « 588 RUE DU PARADIS » SONT 2 FILMS QUI, AU TRAVERS DU PARCOURS D’UN HOMME ET DE SA FAMILLE, POSENT LA QUESTION SUIVANTE :

    PEUT-ON S’INTÉGRER DANS UN PAYS LORSQU’ON EST DÉRACINÉ, SANS RENIER SES ORIGINES ?

    PEUT-ON À LA FOIS ÊTRE FIER DE SES ORIGINES ET FIER DE SA NATIONALITÉ D’ACCUEIL ?

    À L’HEURE OÙ L’ON PARLE TANT DE RACISME, D’INTÉGRATION, D’IMMIGRATION ET DE NATIONALITÉ, LE PARCOURS DE MON PÈRE APPORTE UNE VISION PLEINE D’OPTIMISME SUR CETTE QUESTION.

    COMME BEAUCOUP D’ARMÉNIENS, IL A BÂTI SA CARRIÈRE SUR LE COURAGE, LE TRAVAIL, L’HONNÊTETÉ, L’ESPOIR, ET LA CONVIVIALITÉ, AUTANT DE VALEURS QUI SE SONT PERPÉTRÉES AU FIL DES GÉNÉRATIONS D’ARMÉNIENS, ET NOMBRE D’ENTRE VOUS CE SOIR CROIRONT RECONNAÎTRE DES SCÈNES DE LA VIE DE LEUR FAMILLE, SENTIRONT L’ODEUR DU PAKLAWA OU SOURIRONT AVEC ÉMOTION À L’ÉVOCATION DE CETTE FAMILLE PRÊTE À TOUT SACRIFIER POUR LA RÉUSSITE DE SON FILS.

    ARRIVÉ À L’ÂGE DE 4 ANS DANS UN PAYS DONT IL IGNORAIT TOUT JUSQU’À LA LANGUE, MON PÈRE A FINI PAR RENTRER À L’ACADÉMIE FRANÇAISE À L’ÂGE DE 80 ANS, ET LE JOUR DE SON INTRONISATION IL DISAIT AVEC FIERTÉ DANS UN DISCOURS MAGNIFIQUE :

    « ARMÉNIEN JE SUIS, ET ARMÉNIEN JE RESTE MAIS PLUS FRANÇAIS QUE MOI TU MEURS »

    CE JOUR LÀ FUT SANS DOUTE UN DES PLUS GRANDS MOMENTS DE SA CARRIÈRE, QUI SYMBOLISA SA FIERTÉ D’APPARTENIR SI PLEINEMENT AUX DEUX CULTURES .

    QUEL PLUS BEL EXEMPLE D’INTÉGRATION PEUT-ON IMAGINER ?

    QUELLE LEÇON LES POPULATIONS DÉRACINÉES PEUVENT-ELLES TIRER DE CET EXEMPLE ?

    L’ESPOIR PLUTÔT QUE LA HAINE .

    AVANT DE COMMENCER LA PROJECTION DU FILM JE VOUDRAIS QUAND MËME VOUS DIRE QUE MON PÈRE ETAIT UN FORMIDABLE CONTEUR AU SENS ORIENTAL DU TERME, ET QUE POUR LUI UN FILM DEVAIT AVANT TOUTE CHOSE ÊTRE DIVERTISSANT.

    ALORS SI « MAYRIG » PEUT ÊTRE REGARDÉ COMME UN FILM QUI TRAITE DE L’HISTOIRE DES ARMÉNIENS, ET DE LEUR INTÉGRATION, IL RESTE MALGRÉ TOUT UNE FRESQUE ROMANESQUE, PLEINE DE BELLES ÉMOTIONS, UN SAVANT MÉLANGE DE BIOGRAPHIE ET DE FICTION.

    D’AILLEURS LORSQUE JE LUI DEMANDAIS SI TELLE OU TELLE SCÈNE AVAIT VRAIMENT EU LIEU, MON PÈRE NE SAVAIT PLUS PARFOIS LUI-MÊME FAIRE LA DIFFÉRENCE ENTRE LES SOUVENIRS ET L’INSPIRATION.

    L’ÉCRITURE DE CE FILM REMONTE AU DÉBUT DES ANNÉES 80, MON PÈRE AVAIT RÉALISÉ UN PETIT COURT MÉTRAGE POUR LA TÉLÉVISION, QUI S’APPELAIT « LETTRE À MA MÈRE » ET DANS LEQUEL ON LE VOYAIT LIRE UN TEXTE TRÈS ÉMOUVANT SUR SON ENFANCE, EN HOMMAGE À SA MÈRE.

    À SA GRANDE SURPRISE, CETTE ÉMISSION SUSCITA UN ÉNORME ENTHOUSIASME , CE QUI LE DÉCIDA À ÉCRIRE UN ROMAN DU NOM DE « MAYRIG » QUI PARUT EN 1985 ET QUI FUT ÉGALEMENT UN GROS SUCCÈS.

    LES 2 FILMS SUIVIRENT NATURELLEMENT, ET ILS FURENT LES DEUX DERNIERS FILMS QUE MON PÈRE RÉALISA, COMME UNE PARENTHÈSE QUE L’ON REFERME SUR UNE VIE SI REMPLIE.

    JUSQU’À SON DERNIER SOUFFLE, IL NE CESSA JAMAIS D’ÉCRIRE, ET JE GARDE TOUJOURS PRÉSENTE DANS MA MÉMOIRE L’IMAGE DE CE VIEL HOMME ASSIS DERRIÈRE SON BUREAU JONCHÉ DE FEUILLES DE PAPIER GRIFFONNÉES, RATURÉES, RECOLLÉES, QUI ME LISAIT LE FRUIT DE SON TRAVAIL ET GUETTAIT MES RÉACTIONS POUR SAVOIR SI J’AVAIS AIMÉ.

    EN VOUS PARLANT CE SOIR, JE MESURE LA CHANCE QUE J’AI EU D’ÊTRE LA FILLE DE CET HOMME, ET À QUEL POINT SA DISPARITION M’A RENDUE ORPHELINE DE CES ÉMOTIONS LÀ.

    AUJOURD’HUI, DE MES ORIGINES ARMÉNIENNES IL ME RESTE LE SOUVENIR TOUJOURS PRÉSENT DE CET ILLUSTRE PÈRE, DEUX FILMS QUI RACONTENT SON PARCOURS EXTRAORDINAIRE, ET 3 LETTRES À LA FIN DE MON NOM.

    MAIS BIEN PLUS ENCORE, UN CERTAIN NOMBRE DE VALEURS QUI CARACTÉRISENT MON APPARTENANCE À CE PEUPLE.

    ALORS JE VOUDRAIS SALUER CE SOIR L’INITIATIVE D’ÉRIC RUSDIKIAN D’ORGANISER CETTE PROJECTION ET CETTE RENCONTRE, CAR COMME BEAUCOUP D’ENTRE VOUS, JE ME RÉJOUIS DE POUVOIR PARTAGER ET FAIRE REVIVRE CETTE CULTURE ET CES VALEURS DONT J’AI HÉRITÉ ET QUE J’ESPÈRE JE SAURAI TRANSMETTRE À MON TOUR À MES ENFANTS .

    VOILÀ, C’EST AVEC UN IMMENSE PLAISIR QUI JE L’ESPÈRE SERA PARTAGÉ QUE JE VAIS REVOIR CE FILM EN VOTRE COMPAGNIE.

    BON FILM À TOUS.

    JE ME SOUVIENS DE CE PLAISIR QU’IL AVAIT À ÉCRIRE, CE PERFECTIONNISME QUI LE POUSSAIT À RATURER, DÉCOUPER PUIS RECOLLER DES PANS DE TEXTES ENTIERS, POUR LES JETER À LA POUBELLE, AVANT DE FINALEMENT TROUVER LES MOTS JUSTES QUI SAURAIENT TRANSMETTRE UNE IDÉE, UNE ÉMOTION, UNE HISTOIRE .

    PLEIN DE DOUTES IL ME LISAIT SOUVENT LE RÉSULTAT DE TOUT CE TRAVAIL, VÉRITABLE ÉCHEVEAU DE PAPIERS AUX DIMENSIONS RENDUES INCONNUES PAR TANT DE RACCOMMODAGES. QUAND IL AVAIT TERMINÉ, JE VOYAIS AVEC ÉMOTION L’ENTHOUSIASME SUR CE VISAGE JOVIAL QUI ATTENDAIT UN COMPLIMENT COMME UN PETIT ÉCOLIER QUI ATTEND SA NOTE.

    MON PÈRE ETAIT À LA FOIS UN HOMME PLEIN D’ÉMOTIONS ET EN MÊME TEMPS UN ROC RENDU INDESTRUCTIBLE PAR CE PARCOURS PLEIN D’EMBÛCHES QUE FUT SA VIE.