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La fabrication des tapis d’Orient
par des Arméniens à Marseille – 1922. Quand on parle de tapis dits
d’Orient, dont certains sont tous simplement d’Arménie, il est important
de rappeler que cette fabrication s’est pendant un temps « délocalisée
» en France terre d’accueil, pour des raisons surtout dramatiques.
Les quelques lignes ci-dessous parues dans un journal arménien de
Marseille, L’Aiguillon –Organe des Volontaires Arméniens sous le Drapeau
Français- N° 148 du 20 juin 1927. résument bien la question :
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Après les tristes
événements de Smyrne beaucoup d’Arméniens, dont le nombre est
évalué actuellement à 60.000, sont venus se réfugier en France.
La plupart des hommes sont utilisés dans l’agriculture et dans
les usines, les femmes spécialisées dans la fabrication des
tapis d’Orient sont employées à la fabrique de «Tapis France-Orient»
à Saint- Jérôme (Marseille) sous la direction de MM. Imbert
et Minassian, et directeur technique Monsieur Tchoukhadjian.
Cette société possède 75 métiers à Saint-Jérôme, 50 métiers
à Uzès, directeur Yenook Armen, 25 métiers à Gardanne, 36 métiers
à l’Orphelinat 35 avenue de Capelette à Marseille, sous la direction
de Mme Papazian. Les ouvrières gagnent une dizaine de francs
par jour, maximum 15 francs.
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- La Société « Tapis France-Orient » a été
fondée en 1923, son capital actuel est de trois millions. Le capital
est français et tout le personnel arménien… Il y a aussi les maisons
Ferrand de Marseille avec 15 métiers et 50 à Draguignan, Kévork Avanozian
avec 30 métiers, et D.Hovaguimian, Bagdadlian, M. Moutafian, M.Zartarian,
Tchinarian, Madame Vve Kéchichian. Il y avait en tout près de 400 métiers
avec plus de mille ouvrières, dont plus de la moitié auprès de la Société
Tapis France Orient…
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Quelques temps plus tard, dans
l’Artistica du 24 octobre 1934 :
Il nous est rarement donné l’occasion d’assister à une exposition
où le vrai charme des tapis est présenté dans un ensemble aussi heureux
( Exposition d’Art à la GalerieDetaille)…….
Nous sommes restés émerveillés à la vue de tapis de toutes provenance
; parmi elles se trouvent de belles reproductions de tapis d’Orient……
Nous sommes encore sous le charme que cette visite nous a produit
et c’est bien sincèrement que nous présentons nos vives félici- tations
à la Maison « Tapis France Orient » Atelier Zaret à Saint Jérôme…(Marseille)
- Puis dans le Sémaphore le 23 avril 1935
on pouvait lire au sujet du paquebot Normandie:
…tandis qu’on demandait à Aubusson les tapis des grands locaux,
c’est près de Marseille, aux Ateliers de Monsieur Zareh Tchouhadjian
- Tapis France Orient- à Saint Jérôme, chemin de la Rose, qu’ont
été commandés les épais tapis aux dessins modernes, aux coloris
merveilleux qui doivent compléter l’harmonieux ensemble décoratif
de chaque appartement de luxe………
Et un peu plus tard : A Marseille par exemple on vient
d’achever la fabrication de quelques tapis destinés aux appartements
de luxe du paquebot Normandie. Ce sont d’habiles ouvriers arméniens
établis à Saint Jérôme depuis de nombreuses années, qui les ont
tissés avec un soin particulier, colorant eux-mêmes la laine,
étudiant les dessins originaux qui leur donne-ront ce caractère
d’exotisme.
Ce travail délicat a été fait entièrement à la main.
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- En fait que s’est-il
passé ?
Le succès de l’entreprise est dû à la conjonction de plusieurs éléments.
La société qui est fondée dans un but humanitaire en 1923 par trois
Français, Messieurs Chapuis, Imbert et Honorat (sénateur).
La présence d’une main d’œuvre consciencieuse et riche de son savoir-faire
traditionnel : les réfugiés arméniens. Surtout les femmes.
L’arrivée de M. Zareh Tchouhadjian, qui dès 1926 apporte à l’entreprise
son énergie et sa compétence.
En effet il fut jusqu’en 1912, directeur artistique et technique de
l’Austro-Orientalische (Vienne-Autriche) pour les ateliers de Eréké
et de Koum-Kapou près de Constantinople. Ensuite jusqu’en 1920 de la
société Petag (Persian Carpet C° Limited. Berlin) à Tabriz (Iran), dont
les tapis sont encore réputés dans les salles de ventes.
Il réunit ainsi tous les ingrédients pour une direction dynamique de
la société dont il devient propriétaire en 1932.Pour couronner l’ensemble,
l’architecture d’intérieure, qui est en pleine expansion, offre un bon
débouché aux tapis.
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- La société engrange les succès. La qualité
de sa production est couronnée en France par des prix comme
en 1929 à Nice ( Exposition des Arts Décoratifs) ou à Paris,
en 1937, avec la médaille d’or à l’Exposition Internationale
des Arts et Techniques. Les clients prestigieux conseillés par
les grands décorateurs parisiens se succèdent. Ainsi pour les
grands hôtels comme le George V, le Grand Hôtel, l’Ambassadeur,
le Commodore, rien qu’à Paris. Les Compagnies maritimes font
appel à Tapis France Orient pour leurs cabines et appartements
de luxe, dont la prestigieuse « Normandie ». Et les grandes
Administrations.
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Journal
L'Aguillon de Marseille
L'Organe des Volontaires Arméniens sous
les Drapeaux Français
N° 148, Deuxième
Année, 20 Juin 1927
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Zareh au bureau en 1928
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Deux événements dramatiques
viendront casser cet élan. L’un d’ordre familiale, avec la
disparition de Madame Haïgouhie Tchouhadjian en 1935, qui
affectera le milieu familial et incite Monsieur Tchouhadjian
à déménager en région parisienne, où il créera un atelier
complémentaire pour la réparation des tapis anciens et les
teintures délicates des laines.
L’autre concerne la situation politique européenne, à partir
de 1938 et la guerre mondiale qui s’en suivra à partir de
septembre 1939.
C’est l’arrêt des commandes en France, l’effondrement des
marchés exports, le départ de certains ouvriers à l’armée
et pour finir, la réquisition de l’usine au bénéfice de troupes
polonaises repliées en France.
En 1940 l’atelier parisien et l’usine se trouvent de chaque
côté de la ligne de démarcation. Les relations sont difficiles.
Les activités s’arrêtent.
Un projet de réunion avec une société voit le jour en 1945,
mais sans succès. Ce sera bientôt la fin d’une belle entreprise
humaine.
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Zareh à Londres en 1921
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Exposition internationale
d'Arts et Techniques Paris 1937
Diplôme décerné le 25 Novembre 1937
par le Ministère du Commerce
et de l''Industrie
de la République française
à la Société Tapis France Orient
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Aujourd’hui, il existe nombre
de ces tapis et des souvenirs auprès des personnes ayant travaillé
dans cette société. Au sein de l’Association
ARAM à Marseille, Garbis Artin s’emploie à rassembler ces souvenirs
et les documents de cette époque.
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