Mémoire du Génocide de 1915 dans l'Inconscient collectif :
l'islam discrédité en non-dit ?
  • Il n'est pas question ici de vouloir diaboliser l'islam comme le font certains eurocentristes en ne respectant pas l'approche exégétique du Coran et tenant à le présenter par ce biais comme mauvais. Comme si on disait que le christianisme avait des rites hebdomadaires pour sanguinaires et cannibales : car "ceci est mon corps, ceci est mon sang" est-il dit dans l'eucharisite .

  • Il n'est pas question aussi de faire de l'islamophobie, de chercher à propager l'aversion de l'islam ou bien de s'obstiner à confondre islam et terrorisme islamiste : comme si on tenait à identifier le message des Evangiles à l'Inquisition.

  • Il est question de percevoir la consubstatialité de la mémoire du génocide arménien avec l'Inconscient collectif Orient-Occident. Rappellons que ce génocide a été organisé
    - par un Gouvernement Jeune-Turc [qualifié de "mécréants" par Al-Hossaïn Ibn Ali, Chérif de La Mecque et Gardien des Lieux Saints de l'époque]
    - mettant l'appareil de l'Etat à contribution avec ses différents ministères [celui de l'Intérieur, celui des Armées, celui de la Marine, des transports, etc.]
    - dans un Empire [ottoman qui détenait le Caliphat pendant des siècles] o
    ù le Djihad a été officiellement proclamé dans l'Empire ottoman en Novembre 1914 (*)
    - où la Guerre Sainte du Jihad avait été proclamée par le Cheikh ul Islam de l'Empire [qui était franc-maçon et membre du parti Jeune-Turc(**)].

  • Après la défaite des empires allemand, austro-hongrois et ottoman, les organisateurs et les bourreaux des massacres furent mis en accusation et furent jugés par le nouveau gouvernement ottoman. Mais le génocide restera impuni. Ces criminels
    - dont les plus importants avaient trouvé refuge en Allemagne, en Italie, en Azerbaïdjan puis au Turkestan,
    - dont certains autres qui avaient été incarcérés à Malte par les Britanniques seront ensuite libérés,
    - restèrent sur place en majorité, sans être véritablement inquiétés.

  • Par la suite, le régime kémaliste recyclera ces criminels en mettant à profit leurs différentes compétences. De plus, il faut rappeller que le régime kémaliste aura une politique de table rase en particulier
    - en abolissant le Caliphat,
    - en instituant la "laïcité" [façade d'un laïcisme autoritaire embrigadant le religieux à servir d'abord l'Etat-nation]
    - en mettant en oeuvre l'utilisation de l'alphabet latin pour la langue turque
    - et enfin en exigeant l'utilisation du chapeau ou de la casquette à la place du fez traditionnel (couvre-chef oriental) dorénavant interdit.

  • Il s'en suivra par la suite
    - que le crime ne pourra pas être condamné par toute autorité religieuse comme étant contraire à l'islam,
    - qu'il y aura un barrage alphabétique à la (re)connaissance du génocide dans le pays,
    - et que le souvenir de ce génocide prémédité et programmé par un Etat, se confondera dorènavant dans le monde occidental avec des massacres de chrétiens perpétrés par des populations musulmanes (en costume oriental traditionnel et utilisant l'alphabet arabe).

  • Et malgré une opacité entretenue par les omissions sur le génocide de 1915 par la classe politico-médiatique (à idéologie eurocentriste avouée ou inavouée), on assiste à ce processus pervers où l'image du musulman massacreur s'accentue au fur et à mesure de l'occultation du génocide arménien. Ainsi, il y a incrimination (volontaire ou par dérive) en non-dit de l'islam par ces omissions répétées sur le génocide arménien : incrimination qui par de telles manoeuvres, voile en plus la responsabilité des Puissances alliées dans la genèse du négationnisme du génocide arménien officialisé par le Traité de Lausanne de 1923.

  • C'est ainsi que dès 1916, Faiez El-Ghocein, un chef bédouin syrien, capitaine dans larmée ottomane pendant la 1ère Guerre mondiale et témoin visuel des massacres, a pu attester cette réflexion politico-religieuse dans la conclusion de son témoignage :

    « … Certes l’islam doit se disculper des fautes dont on pourrait l’incriminer, car si l’Europe n’est pas mise au courant de ces évènements, elle les considérera comme une tâche ineffaçable dans l’histoire de l’islam.

    Or, il ressort des versets et des citations que nous avons reproduits que les agissements du gouvernement turc sont contraires aux dogmes de la religion. Et un gouvernement qui se dit le protecteur de l’islam et qui détient le khalifat ne peut agir contrairement aux préceptes de la Châri’ah, et en le faisant, il cesse d’être un gouvernement musulman et n’a plus aucun droit à ses prérogatives. Les musulmans doivent donc renier un pareil gouvernement qui foule aux pieds les versets du Coran et les hadiths du Prophète en tuant des innocents ; sinon ils seraient considérés comme ayant trempé dans ce crime qui n’a pas de précédent dans l’histoire.

    En terminant, je m’adresse aux Puissances de l’Europe et j’atteste ce qui a encouragé le gouvernement turc dans ses méfaits ce sont ces mêmes Puissances qui, connaissant la mauvaise administration turque et les cruautés qu’elle a commises en maintes occasions, n’ont rien fait pour l’empêcher de continuer de mal oeuvrer.
    »

    Ecrit à Bombay, 4 Zul-Kida 1334 (le 3 Septembre 1916)
    Les massacres en Arménie turque de Faiez El-Ghocein pp 56-57, Beyrouth 1965

    Faiez El-Ghoceïn était avocat de profession. La 1ère édition de son témoignage fut publiée en français au Caire en 1917. Les autres versions furent :
    . en anglais à New York en 1918
    . en allemand à Zurich en 1918
    . en arabe : à Beyrouth en 1988,
    au Caire en 2003. Sur web depuis 2005 [(#1)] . [(#2)] . [(#3)] . [(#4)] . [(#5)]
    L'avocat arabe rendit visite au B
    ureau arménien de Londres en 1920 à l'occasion de la signature du Traité de Sèvres.

  • La reconnaissance du génocide arménien et la condamnation de son négationnisme actuel deviennent ainsi une étape incontournable du dialogue islamo-chrétien aussi bien dans la communauté musulmane de France qu'au au niveau de la diplomatie mondiale.

  • Nil Agopoff, Paris le 9 Juin 2004

  • (*) : ce que le Sultan Hamid II n'avait jamais osé le faire en son temps bien qu'il avait eu une politique islamiste criminelle
    (**) : Le Cheikh ul Islam de l'Empire, Musa Kiazim, membre du parti Union et Progrès, sera initié à la franc-maçonnerie à la loge "Constitution" de Salonique dont le vénérable était Djavid bey un autre Jeune-Turc.[Arthur Beylérian, Les Grandes Puissances, l'Empire ottoman et les Arméniens dans les Archives françaises (1914-1918), Publications de la Sorbonne, Paris 1983, introduction p. XVI]

A compléter