- Il n'est pas question ici de vouloir diaboliser
l'islam comme le font certains eurocentristes en ne respectant pas l'approche
exégétique du Coran et tenant à le présenter
par ce biais comme mauvais. Comme si on disait que le christianisme
avait des rites hebdomadaires pour sanguinaires et cannibales : car
"ceci est mon corps, ceci est mon sang" est-il dit dans l'eucharisite
.
- Il n'est pas question aussi de faire de l'islamophobie,
de chercher à propager l'aversion de l'islam ou bien de s'obstiner
à confondre islam et terrorisme islamiste : comme si on tenait
à identifier le message des Evangiles à l'Inquisition.
- Il est question de percevoir la consubstatialité
de la mémoire du génocide arménien avec l'Inconscient
collectif Orient-Occident. Rappellons que ce génocide a été
organisé
- par un Gouvernement Jeune-Turc [qualifié de "mécréants"
par Al-Hossaïn
Ibn Ali, Chérif de La Mecque et Gardien des Lieux Saints
de l'époque]
- mettant l'appareil de l'Etat à contribution avec ses différents
ministères [celui de l'Intérieur, celui des Armées,
celui de la Marine, des transports, etc.]
- dans un Empire [ottoman qui détenait le Caliphat pendant des
siècles] où le Djihad a été officiellement proclamé dans l'Empire ottoman en Novembre 1914 (*)
- où la Guerre Sainte du Jihad avait été proclamée
par le Cheikh ul Islam de l'Empire [qui était franc-maçon
et membre du parti Jeune-Turc(**)].
- Après la défaite des empires allemand,
austro-hongrois et ottoman, les organisateurs et les bourreaux des massacres
furent mis
en accusation et furent
jugés par le nouveau gouvernement ottoman. Mais le génocide
restera impuni. Ces criminels
- dont les plus importants avaient trouvé refuge en Allemagne,
en Italie, en Azerbaïdjan puis au Turkestan,
- dont certains autres qui avaient été incarcérés
à Malte par les Britanniques seront ensuite libérés,
- restèrent sur place en majorité, sans être véritablement
inquiétés.
- Par la suite,
le régime kémaliste recyclera ces criminels en mettant
à profit leurs différentes compétences. De plus,
il faut rappeller que le régime kémaliste aura une politique
de table rase en particulier
- en abolissant le Caliphat,
- en instituant la "laïcité" [façade d'un
laïcisme autoritaire embrigadant le religieux à servir d'abord
l'Etat-nation]
- en mettant en oeuvre l'utilisation de l'alphabet latin pour la langue
turque
- et enfin en exigeant l'utilisation du chapeau ou de la casquette à
la place du fez traditionnel (couvre-chef oriental) dorénavant
interdit.
- Il s'en suivra par la suite
- que le crime ne pourra pas être condamné par toute autorité
religieuse comme étant contraire à l'islam,
- qu'il y aura un barrage alphabétique à la (re)connaissance
du génocide dans le pays,
- et que le souvenir de ce génocide prémédité
et programmé par un Etat, se confondera dorènavant dans
le monde occidental avec des massacres de chrétiens perpétrés
par des populations musulmanes (en costume oriental traditionnel et
utilisant l'alphabet arabe).
- Et malgré une opacité entretenue
par les omissions sur le génocide de 1915 par la classe politico-médiatique
(à idéologie eurocentriste avouée ou inavouée),
on assiste à ce processus pervers où l'image du musulman
massacreur s'accentue au fur et à mesure de l'occultation du
génocide arménien. Ainsi, il y a incrimination (volontaire
ou par dérive) en non-dit de l'islam par ces omissions répétées
sur le génocide arménien : incrimination qui par de telles
manoeuvres, voile en plus la responsabilité des Puissances alliées
dans la genèse du négationnisme du génocide arménien officialisé par le Traité de Lausanne de 1923.
- C'est ainsi que dès 1916, Faiez El-Ghocein,
un chef bédouin syrien, capitaine dans larmée ottomane pendant la 1ère
Guerre mondiale et témoin visuel des massacres, a pu attester
cette réflexion politico-religieuse dans la conclusion de son témoignage
:
« … Certes l’islam doit se
disculper des fautes dont on pourrait l’incriminer, car si l’Europe
n’est pas mise au courant de ces évènements, elle les considérera
comme une tâche ineffaçable dans l’histoire de l’islam.
Or, il ressort des versets et des citations que nous avons reproduits
que les agissements du gouvernement turc sont contraires aux dogmes
de la religion. Et un gouvernement qui se dit le protecteur de l’islam
et qui détient le khalifat ne peut agir contrairement aux préceptes
de la Châri’ah, et en le faisant, il cesse d’être un gouvernement
musulman et n’a plus aucun droit à ses prérogatives. Les musulmans
doivent donc renier un pareil gouvernement qui foule aux pieds les
versets du Coran et les hadiths du Prophète en tuant des innocents
; sinon ils seraient considérés comme ayant trempé dans ce crime qui
n’a pas de précédent dans l’histoire.
En terminant, je m’adresse aux Puissances de l’Europe et j’atteste
ce qui a encouragé le gouvernement turc dans ses méfaits ce sont ces
mêmes Puissances qui, connaissant la mauvaise administration turque
et les cruautés qu’elle a commises en maintes occasions, n’ont rien
fait pour l’empêcher de continuer de mal oeuvrer. »
Ecrit à Bombay, 4 Zul-Kida 1334 (le 3 Septembre
1916)
Les massacres en Arménie turque
de Faiez El-Ghocein pp 56-57, Beyrouth
1965
Faiez El-Ghoceïn était avocat
de profession. La 1ère édition de son témoignage fut publiée en français
au Caire en 1917. Les autres versions furent :
. en anglais à New York en 1918
. en allemand à Zurich en 1918
. en arabe : à Beyrouth en 1988, au Caire en 2003. Sur web depuis 2005 [(#1)] . [(#2)] . [(#3)] . [(#4)] . [(#5)]
L'avocat arabe rendit visite au Bureau arménien de Londres en 1920
à l'occasion de la signature du Traité de Sèvres.
- La reconnaissance du génocide arménien et la condamnation
de son négationnisme actuel deviennent ainsi une
étape incontournable du dialogue islamo-chrétien aussi
bien dans la communauté musulmane de France
qu'au au niveau de la diplomatie mondiale.
-
Nil Agopoff,
Paris le 9 Juin 2004
- (*) : ce que le Sultan Hamid II n'avait jamais osé le faire en son temps bien qu'il avait eu une politique islamiste criminelle
(**) : Le Cheikh ul Islam
de l'Empire, Musa Kiazim, membre du parti Union et Progrès,
sera initié à la franc-maçonnerie à la
loge "Constitution" de Salonique dont le vénérable
était Djavid bey un autre Jeune-Turc.[Arthur Beylérian, Les Grandes Puissances, l'Empire ottoman et les Arméniens
dans les Archives françaises (1914-1918), Publications
de la Sorbonne, Paris 1983, introduction p. XVI]
|